Nous y voilà, à cette dernière journée. A la fin de l'histoire et à son dénouement si prévisible que l'on refusait de trop y penser. Le début de matinée sera calme. Profiter d'un moment paisible sur la rivière au centre de la Konglor cave. Il est tôt et nous sommes seuls à naviguer dans le noir pour découvrir ce lieu majestueux, ses pleins et ses vides, ses odeurs et sa fraicheur.
Deux heures passent au gré de l'eau et nous font oublier ce qui nous attend... Mais nous ne pourrons repousser indéfiniment le départ. Il est 10 heures. Plus de 140 kilomètres nous séparent de Thakhek et de la fin de cette boucle motorisée.

L'histoire nous conduit à nouveau à travers des paysages qui régalent nos mirettes. Quitte à vivre un cauchemar, autant que son environnement soit joli. Nous n'avons aucune illusion et mes yeux restent rivés sur le compteur qui avale les kilomètres. Appréhension du chiffre 80.
Réglée comme du papier à musique, notre moto nous fait défaut à 81km. Autre journée, même scénario. Nos muscles se souviennent encore des poussées des jours passés, il ne sera pas bien compliqué de se remettre dans le bain. Après une quinzaine de minutes nous voilà dans le même cirque. Réparer. Expliquer le nombre de crevaisons. Expliquer que ce n'est pas normal. Montrer la gente défectueuse aperçue dès le premier jour. Pointer du doigt le pneu... rien n'y fait. La barrière de la langue est belle et bien là, nous ne pourrons que continuer à la subir.

Chambre à air changée. Remonter en selle. Croiser les doigts. Puis s'arrêter. Vérifier que tout va bien. Remonter en selle et finir par crever à nouveau une vingtaine de kilomètres plus loin.
Il fait chaud. Nos esprits sont peu à peu épuisés par le scénario dans lequel nous sommes enrôlés de force. Pousser. Voir défiler des dizaines de pickup flambants neufs. Faire du stop en vain. Laisser quelques larmes couler d'épuisement. Pousser pour passer cette satanée colline qui nous fait face. Après une heure, expliquer, négocier, réparer puis repartir la peur au ventre. Combien de kilomètres défileront cette fois ci?

On dit qu'après la pluie vient le beau temps. Métaphoriquement parlant, ce ne sera pas pour nous...d'un point de vue littéral non plus d'ailleurs. L'histoire aura décidé d'inverser les éléments et de mettre sur notre chemin un orage déchainé déversant ses rafales de pluie sur un paysage aride. Nous continuons de rouler pour contrer le mauvais sort. Bientôt incapables de voir quoi que ce soit nous n'auront d'autre choix que de nous abriter dans l'attente d'une accalmie.
Une heure passe. La pluie tombe toujours mais moins violemment. Il est déjà 16h et commençons alors à courir après le jour. Une course perdue d'avance. La nuit ne tardera pas à nous rattraper et emmènera avec elle une pluie infatigable.
Plus que 40km. Tenter de positiver. "Nous avons peut être une chance non?". Non. Aucune chance. Aucune illusion. C'est au milieu de la campagne en pleine nuit et sous le déluge que nous crevons à nouveau. Ereintés, irrités, désespérés, nous poussons, éclairons et klaxonons les pickups qui nous doublent à vive allure dans l'espoir que l'un d'entre eux s'arrête.
Personne. Nuit noire. Personne ne s'arrêtera. Finir par se poser à côté d'une petite cabane éclairée pour tenter d'alpaguer une camionnette. Rien. Pas de réaction. Nous nous voyons déjà dormir ici, au milieu de nulle part et dans l'humidité.
Incantations magiques, insultes à bouddha et aux laos, ce peuple qui prie quotidiennement en donnant du riz à manger à des statues de pierre et ne sait pas s'arrêter pour aider un vivant... moment d'égarement pas très glorieux que l'on avoue sans fierté...

C'est alors plein de désespoir que nous tendons le pouce une dernière fois avant capitulation. Une dernière fois qui nous fera retrouver le sourire. Une camionnette qui s'arrête. Des visages aimables. Un oui qui réchauffe. Monter la moto et se faufiler dans la cabine, étroite mais réconfortante. Nos bonnes étoiles sont deux jeunes vietnamiens que l'on n'aura de cesse de remercier. Lorsque l'on se remémore notre ressentiment du mois passé au Vietnam, on se dit que l'histoire est taquine et aime tordre le coup aux préjugés.

Arriver enfin  à Thakhek. Rendre la moto et se réjouir de pouvoir prendre une bonne douche, un bon repas et se reposer enfin de ces mésaventures dans la chambre que nous avions réservée.
Mais l'histoire nous souhaitait pas nous lâcher ainsi. Réservation mal comprise. Pas de réservation. Guesthouse complète... Il y a des moments où l'on se demande pourquoi rien ne semble tourner rond. Comme le dirait notre ami Québécois Paul:  "Ça n'a pas de bon sens une malchance pareille"... et il a raison, ça n'a vraiment pas de bon sens.

Il est 21h30 lorsque l'on se pose enfin après avoir longuement marché, sac sur le dos et vêtements trempés pour trouver notre refuge.
Il est 21h30. Il ne nous reste plus qu'à fermer les yeux et attendre que le temps passe pour clôturer cette histoire qui ne nous aura pas épargnés. On ne regrette pas. Les paysage en valaient la peine. On sait aussi que l'on en sourira...Pour l'instant, on digère.










0 pépitos:

fais pas ci fais pas ça... ici tu as le droit, c'est blabla

Pour écrire un blabla, rien de plus simple:
Sélectionnez "nom/url". Remplissez les deux champs (l'url n'est pas obligatoire).
Ecrivez votre message, cliquez sur "publier" et c'est parti!